• Accueil
  • Qu’est-ce que le CIPPA ?
  • Les chercheurs
  • Les doctorants
  • Les partenaires
  • Recherche

Centre International de Philosophie Politique Appliquée

CIPPA

  • Pauvreté et inégalités
    • Comment mesurer le développement ? La question des indicateurs
    • Indicateurs de développement, de pauvreté et de genre
    • Indicateurs de bien-être
    • Les inégalités sociales de santé : un impensé du débat sur la marchandisation du corps ?
  • Violence et conflits
  • Genre
    • Genre Texte d’introduction
    • Du genre comme culture ?
    • Le féminisme musulman à l’épreuve des inégalités sexo-spécifiques
    • Documents et rapports
    • Organisations européennes et internationales
  • Justice ethnoculturelle
    • Culture Texte d’introduction
    • Qu’est-ce qui ne va pas en France avec le multiculturalisme ?
  • Justice transitionnelle
    • Indices de démocratisation
  • Éthique et politique climatiques
    • Climat Texte d’introduction
  • Approches cinématographiques
    • Journée de recherche du 2 mars 2015 : Philosophie politique et cinéma
    • Un nouveau débat sur Eichmann : Arendt , Heidegger ou Kant ?
    • Philosophie politique et sociale
  • Politiques universitaires
    • Interview de la revue de l’Université de Keio
    • Lois françaises sur les universités
    • Indicateurs d’équité des systèmes éducatifs européens
      • Méthodologie de la construction d’indicateurs d’équité des systèmes éducatifs
    • Rapports sur l’enseignement supérieur
      • Projet de texte de loi portant sur l’organisation de la nouvelle université (27 juin 2007)
      • 12-08-2007 Loi relative aux libertés et responsabilités des universités (10 août 2007)
      • 18-02-2009 Projet de réforme de la première année de médecine
    • Les systèmes européens
      • Le système universitaire de la Suède
      • Le système universitaire de l’Irlande
      • Le système universitaire de la Pologne
      • Le système universitaire du Danemark
      • Le système universitaire des Pays-Bas
      • Le système universitaire de la Belgique
      • Le système universitaire de l’Autriche
      • Le système universitaire de l’Italie
      • Le système universitaire de l’Allemagne
      • Le système universitaire de la Grande-Bretagne
      • Le système universitaire de l’Espagne
      • Le système universitaire de la Suisse
        • Professionnaliser les formations dans le domaine des humanités
    • L’insertion professionnelle des étudiants
      • Les politiques de professionnalisation des cursus universitaires
      • Un débat sur l’insertion professionnelle des étudiants
      • Entretien avec Élise Verley et Martine Migeot, membres de l’OIP
      • Entretien avec Marie-Madeleine Martinet, Professeur d’Anglais à l’Université Paris-Sorbonne
      • Entretien avec Françoise Mélonio, Professeure de Littérature à l’Université de Paris-Sorbonne
      • Entretien avec Guillaume Houzel, Président de l’Observatoire national de la Vie Étudiante
      • Entretien avec Liliane Gallet-Blanchard, directeur de l’UFR LEA à l’Université Paris-Sorbonne
      • Synthèse des entretiens sur la professionnalisation
    • Questions sur l’autonomie des universités
      • L’autonomie des universités au péril de la crise
      • Après l’autonomie, que faire pour les universités ?
    • Colloque OEPU de 2009
      • Présentation
      • Programme
      • Publication issue du Colloque
    • Recherches internes à l’OEPU
      • Qui sont les étudiants ?
      • Le débat français sur le service public
      • Un concept de l’Université
      • Le modèle humboldtien
      • Le moment révolutionnaire
      • Louis Liard et l’élitisme républicain
  • Fondations
    • IGEP Texte d’introduction

Un concept de l’Université

Alain RENAUT
UN CONCEPT DE L’UNIVERSITE
(Extrait de : A. Renaut, Que faire des universités ?, Bayard, 2002)

Pour tenter de comprendre, en matière de réalité universitaire, l’exception française et de l’évaluer en termes de politiques publiques, une condition quasi épistémologique est indispensable. Elle consiste à mesurer notre réalité universitaire à une notion de l’université. Non pas certes à un concept abstrait, à une idée pure de l’université, que l’on déduirait a priori d’exigences atemporelles de la raison. Mais à un concept empirique, qui se serait dégagé peu à peu de ce qu’a été l’université depuis qu’elle est apparue, au XIIIe siècle, à Paris, à Bologne et à Oxford.

Esquisser un tel concept des universités requiert de rappeler en quel sens le Moyen Age a vu surgir soudain des universités, et dans quelle mesure, chez les Modernes, cette invention médiévale a pu, pour un temps, donner lieu à une tentative de réinvestissement sur des bases renouvelées. De ces deux moments, le moment médiéval et le moment allemand, dont le second fut dominé dans les premières années du XIXe siècle par la figure de Wilhelm von Humboldt ( voir ici même, sur ce site, « Le modèle humboldtien »), se laisse dégager une caractérisation de ce que peut avoir de spécifique un dispositif universitaire : les interrogations de notre présent en seront-elles suffisamment éclairées ? A chacun d’en juger.

*

L’institution universitaire est née au XIIIe siècle sous la forme d’une « corporation réunissant des maîtres et des disciples » ( universitas magistrorum atque scholarium ) sous l’autorité de l’Eglise.

Dans cette naissance, la volonté de favoriser la défense d’intérêts communs et de conquérir des privilèges joua certes un rôle important. Ceux qu’on désigna bientôt comme les « manieurs de livres » étaient cependant animés également par un certain nombre de convictions. Les plus importantes furent relatives au savoir, aux conditions de sa production comme de son apprentissage. Elles consistèrent notamment à estimer souhaitable que la formation des futures élites au savoir de haut niveau pût coïncider, dans les facultés de théologie, de droit et de médecine, avec une production de ce savoir lui-même : les enseignants seraient aussi des savants oeuvrant à édifier un savoir qu’ils transmettraient d’autant mieux qu’ils en seraient les auteurs, ou qu’ils seraient les acteurs de son renouvellement. D’autre part, la conscience d’une unité des connaissances présida à une organisation enracinant les trois facultés supérieures dans un tronc commun constitué par la faculté des arts : issus des découpages romains de l’enseignement, les « arts libéraux » ( grammaire, dialectique ou art de raisonner, rhétorique ou art de parler et d’écrire, arithmétique, astronomie, géométrie, musique ) apparurent alors définir les contours d’une première formation indispensable pour donner aux futurs clercs les bases communes de leurs savoirs.

Dans ce contexte, c’est au fond sur un pari que l’institution académique avait originellement entrepris de se constituer : celui, on vient de l’entrevoir, de combiner principalement trois fonctions. Ce pari fut à la racine d’un dispositif qui s’est mis en place au début du XIIIe siècle, en Italie ( Bologne, 1190 ), en Angleterre ( Oxford, 1214 ) et en France ( Sorbonne, 1215 ). Il s’est étendu ensuite aux principaux pays d’Europe, globalement à partir du même projet de combiner les trois fonctions qu’on va rappeler, avec certes des nuances imprimées par le contexte religieux ou politique.

Il s’agissait tout d’abord de former au savoir et, plus précisément, au savoir de haut niveau. L’université est née, au XIIIe siècle, du projet de construire un cursus continu et progressif d’études conduisant des écoles ( correspondant à nos actuels enseignements primaires et secondaires ) jusqu’à un haut enseignement, comme l’on a dit très longtemps, ou jusqu’à un “enseignement supérieur”, comme l’on dit aujourd’hui, avec lequel l’institution universitaire se confond dans les principaux pays où ( hors de France ) il existe des universités.

Point culminant des institutions de formation, l’université a aussi visé une deuxième fonction, moins évidente, mais dont la combinaison avec la première fut une condition constitutive de l’espace universitaire : la formation au savoir de haut niveau s’est en effet conçue dès le XIIIe siècle comme inséparable de la formation du savoir lui-même. Le pari de l’université a ainsi été que le savoir transmis, à son meilleur niveau, coïncidait avec le savoir produit, que la transmission et la production du savoir pouvaient ne pas être dissociées, et que les universitaires devaient donc contribuer à produire le savoir qu’ils inculquaient à leurs étudiants. C’est précisément en vue de ménager un tel point de coïncidence entre ce que l’on n’appelait pas encore l’enseignement et la recherche que le cursus médiéval fut organisé selon le schéma qu’on a rappelé : si, après l’enseignement de base dispensé dans les écoles, les étudiants fréquentaient d’abord la faculté des arts ( au sens des arts libéraux ), c’était afin de disposer d’une formation générale suffisamment solide pour ensuite, dans l’une des trois facultés spécialisées ( droit, médecine, théologie ), participer à un haut enseignement, dont l’élévation se définirait par sa capacité à former aussi bien les étudiants que le savoir nécessaire à leur formation. Ainsi, dès le Moyen Age, l’université, en son sens étymologique de la “corporation des maîtres et des étudiants”, s’est-elle regroupée autour du savoir et des exigences d’un authentique service du savoir, permettant non seulement sa conservation ou sa diffusion, mais aussi sa construction et son amélioration. C’est ce modèle qu’en 1964 encore Georges Gusdorf décrivait avec fascination quand il expliquait que la réunion des maîtres et des écoliers en une “universitas” s’enracinait alors dans l’idée d'”une totalisation des connaissances ( universitas scientiarum ) débouchant en fin de compte sur une connaissance de la totalité”[1]. C’était assurément idéaliser la réalité médiévale : dans la tradition française notamment, les universités, qui étaient originellement des institutions cléricales, se sont rapidement dérobées devant l’exigence de former, donc de renouveler le savoir, pour devenir des lieux de formation dogmatique, formant à un supposé savoir déjà constitué. Du moins ne fut-ce pas le cas partout. De ce point de vue, une étude historiquement plus complète aurait à souligner l’importance qu’a pu avoir en Allemagne, à partir de la Réforme, la création des universités protestantes, plus aptes, pour des raisons évidentes, à reprendre le projet d’une formation au savoir qui serait aussi formation du savoir lui-même. Dans les universités catholiques en revanche, la puissance de la dogmatique et de la tradition romaines ont fortement paralysé ce processus et fermé l’université aux savoirs nouveaux ou aux découvertes scientifiques, qui se sont opérées souvent contre elle et hors d’elle.

Quoi qu’il en fût de cette sclérose progressive, il faut, pour achever de construire les termes du pari d’où sont nées les universités, compléter le repérage des fonctions qui ont été constitutives de l’institution elle-même. Une troisième fonction a en effet été conçue dès le départ comme le produit naturel de la combinaison des deux autres, et c’est en grande partie elle qui a longtemps conféré à l’université son importance sociale, en même temps que son prestige : la corporation universitaire a compris son activité comme devant permettre, parmi son public, le recrutement d’élites. Il s’est agi initialement d’élites religieuses, sous la forme des membres de la hiérarchie de l’Eglise. A la faveur de la laïcisation de l’université, telle qu’elle s’accomplit peu à peu jusqu’au XVIIIe siècle, ces élites furent conçues de façon plus large, au sens des élites dont la société moderne naissante pouvait avoir besoin pour sa gestion, pour son administration, bref : pour toutes les fonctions qui supposaient l’acquisition préalable d’un savoir supérieur à celui de la moyenne de la population. La conviction sur la base de laquelle les universités se sont édifiées en Europe a ainsi été que les bénéficiaires d’un enseignement suffisamment élevé pour que les exigences de la formation au savoir et celles de la formation au savoir pussent, au moins au sommet de l’édifice, coïncider seraient aussi ceux qui, ensuite, dans la société, dans l’économie, dans la haute administration, rempliraient le mieux leurs fonctions.

Point capital, à vrai dire, pour comprendre ce qui a été d’emblée une spécificité de l’institution universitaire, la distinguant par essence d’autres lieux de formation qui lui ont très tôt fait concurrence, telles que les écoles fondées par les Jésuites : c’est en liaison directe avec cette troisième fonction que les universités ont eu en général une tradition marquée d’ouverture assez large. S’il s’agissait en effet, à travers une formation dont on a suggéré les exigences qu’elle s’imposait, de recruter des élites, le dispositif mis en place ne pouvait répondre à cet objectif qu’en s’organisant de manière que la base de recrutement fût sensiblement plus large que la population à recruter – faute de quoi la perspective de dégager les meilleurs n’eût pu correspondre à aucun semblant de réalisation. Conviction durable qui fera écrire encore à un Louis Liard, lors de la refondation républicaine des années 1880, que l’Université doit être organisée de façon à “assurer dans la masse la sélection de l’élite”[2] – selon un principe déjà sous-jacent à l’organisation médiévale, où la faculté des arts, conçue comme une sorte de “sas” entre les écoles et les facultés spécialisées, était de loin la plus ouverte : même à une époque où l’on verra que le public des universités connaissait une diminution inquiétante, elle comptait encore 5000 étudiants à Paris vers 1789, contre moins de 600 inscrits en droit. Ainsi la structure des quatre facultés, avec le rôle propédeutique dévolu aux “arts”, correspondait-elle à une fonction sociale qui excluait logiquement l’adoption d’un principe de fermeture. Par lui-même, le souci de l’efficacité l’exigeait déjà, si du moins l’on accorde que, pour faire surgir le petit nombre des meilleurs, il faut dispenser à un nombre suffisamment grand une formation au savoir prolongée par certains seulement vers l’accès aux recherches savantes. L’égalité des chances que cherchera à promouvoir, à la fin du XIXe siècle, l’élitisme républicain ne fera qu’imposer plus fortement encore ce choix.

[1] G. Gusdorf, L’Université en question, Paris, Payot, 1964.

[2] L. Liard, L’enseignement supérieur en France, 1789-1889, Paris, A. Colin, 1888, t. II. Philosophe, spécialiste de Kant et de Mill, logicien, Liard fut aussi Recteur de l’Académie de Caen, Directeur de l’enseignement supérieur de 1884 à 1902, Recteur de l’Académie de Paris. Il est considéré à juste titre comme ayant été le principal inspirateur et acteur de la reconstruction de l’Université française entreprise à partir de 1875.

Activités

  • Agenda
  • Séminaire CIPPA 2016-2017, semestre I (d’octobre 2016 à janvier 2017)
  • IGEP – Programme ANR sur les inégalités
  • Colloques internationaux
  • Journées d’étude et de recherche
  • Multimédia
    • L’injustifiable et l’extrême. Manifeste pour une philosophie politique appliquée
  • Abonnez-vous
  • Archives du séminaire IGEP

Publications

  • Les 10 dernières publications des membres de CIPPA
  • Collection
    Philosophie appliquée

Copyright © 2021, tous droits réservés · Informations légales · Contact